
14ème étape : Culoz – Ferme Bertrand

Le Col du Grand Colombier est réservé aux cyclistes de 07h00 à 15h00. A 7h30, après une soirée et une nuit pluvieuse, je suis devant la maison du vélo où je dois, comme convenu, déposer mes sacoches pour réaliser l’ascension. Las, je trouve porte close.
Un porche me permettra d’attendre en m’abritant de la bruine. Je crains d’avoir mal compris et de devoir patienter jusque 9h, horaire d’ouverture habituel du lieu. Je vois arriver deux cyclistes qui vont et viennent, semblant comme moi, dans l’expectative.
A 8h00, arrive l’animateur portant café et biscuits. La pluie a cessé mais une brume tenace s’accroche aux pentes. Nous sommes trois prêts à partir. Confiant, j’entame l’ascension laissant mon coupe pluie dans ma sacoche de guidon. Délesté de mon pesant bagage, je ne vole pas pour autant mais progresse à meilleure allure sollicitant moins les grands pignons. Passé les nuages, l’horizon se dégage un peu mais la chaîne du Mont Blanc demeure masquée.
Au sommet, une équipe des Fêlés du Grand Colombier est là, sous une tonnelle qui ne les protège pas d’un vent froid, proposant un ravitaillement. Un Sixphonné du Mont Brouilly est venu leur tenir compagnie et promouvoir le défi de sa confrérie. Sitôt identifié comme appartenant au Vélo Club de Roubaix, tous me parlent d’Hugo également membre du club, grand fêlé parmi les Fêlés, Sixphonnés et autres adeptes des pentes à deux chiffres et ascensions sur toutes les faces.
Fraicheur et grisaille n’incitent pas à la flânerie et la chaleur de l’accueil ne suffit pas à faire monter ma température interne. J’entame donc la descente, cette fois bien couvert. Retour dans les nuages, il faut être prudent car la visibilité est médiocre. Se garder des pierres qui jonchent parfois la chaussée et des cyclistes de plus en plus nombreux à monter, certains parfois occupant dans une progression zigzagante toute la largeur de la chaussée. Saluts et encouragements mutuels ponctuent cette descente alors que le soleil s’affirme doucement. Ceux partis plus tardivement profiteront finalement d’un col ensoleillé. La GTJ m’attend et après avoir récupéré mes sacoches, je reprends mon périple sous le soleil.
Je passe au pied du Grand Colombier désormais bien dégagé. Les paysages changent. Les reliefs se font plus doux.
Je bivouaquerai à la ferme Bertrand, gite d’étape entouré de vastes pâtures, offrant un accueil sympathique et plus prosaïquement l’accès aux sanitaires du restaurant. Je serai rejoint pas six randonneurs belges hédonistes qui finissent leur GTJ en VTT électrique. Ils prévoient également l’ascension du Grand Colombier par Virieu-le-Petit. Comme je leur fais remarquer que ce versant est particulièrement pentu, l’un d’eux me répond que cela n’est pas un problème et qu’il suffira de passer en mode turbo. Si la route est identique pour tous, la façon de la parcourir est singulière.



















15ème étape : Ferme Bertrand – Lamoura

Je pars tôt, ayant prévu de faire mes courses du jour à la première heure à Bellegarde. C’est doublement trop tôt car d’une part les magasins ne sont pas ouverts lorsque j’y parviens et que secondairement je croiserai sur ma route de nombreuses boutiques ouvertes en ce dimanche matin, auxquelles j’aurais pu recourir m’évitant ainsi un portage inutile.
Je fais une courte halte café à Lajoux et délaisse le spectacle de la fête de la Grande Rubatée qui bat son plein sous le soleil. Des orages sont annoncés dans l’après midi et je préfère jouer la prudence.
De nouveau, en l’absence de camping je planterai la tente à côté d’un restaurant-gîte. J’aurai juste le temps de le faire et de procéder à une toilette sommaire dans les sanitaires du restaurant avant que la pluie ne tombe pour le restant de l’après-midi et une bonne partie de la nuit. Malgré quelques points de percement ici ou là, la tente tient bon et je reste au sec confiné dans mon ermitage. Heureusement, comme aime à me le rappeler mon épouse moquant mon caractère taciturne, j’ai une vie intérieure riche.
C’est peut-être dans un de ces moments que j’ai commencé à concevoir le texte suivant en lien avec mes réflexions du jour quant au choix du bon moment pour faire les courses.
Quand on aime on ne compte pas
Je ne suis pas du genre à couper les queues de brosses à dents en quatre pour économiser quelques grammes. J’avais renoncé à peser mes sacoches avant de partir, je le fis au retour la balance marquant 21 kilos.
Rien ou peu de leur contenu n’avait pas servi, ce qui ne veut pas dire que tout était indispensable. Un manque de témérité sans doute et la recherche d’un minimum de confort me font préférer rouler chargé. A commencer par ma tente qui est de deux places. Mais j’aime pouvoir m’étaler profitant de ses deux absides latérales pour stocker sacoches et matériel de cuisine (qui précisons le quand même se résume à un bruleur au gaz et des gamelles gigognes). Dans ce contexte, la recherche d’allègements marginaux a peu de sens. Si l’on additionne poids du vélo, du cycliste des bagages et des bidons d’eau ce sont près de cent kilos qu’il faut déplacer. Dès lors, gagner un kilo ne représente qu’un pour-cent du total.
J’ai ainsi fait franchir Lautaret et Galibier à un concombre de 400 g environ que je ne mangeai qu’à Saint Michel de Maurienne. Sans doute ai-je ainsi inconsidérément ingéré un concombre qui aurait pu figurer au livre Guiness des records. De même, ai-je transporté durant une grande partie de mon trajet un paquet de boulgour en prévision des jours de blizzard, paquet qui revint avec moi et resta durant plusieurs mois dans mes réserves.












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